Written by by Anna Dimitrova-Stull

Selon les données disponibles, un enfant est porté disparu toutes les deux minutes au sein de l’Union européenne (UE). Dans la mesure de ses compétences, celle-ci déploie des efforts afin de soutenir les États membres dans la lutte contre ce phénomène dont l’étendue globale reste difficile à déterminer. Le 25 mai est la “Journée internationale des enfants disparus” qui vise à sensibiliser le public et à apporter un message de soutien et d’espoir aux familles concernées.

Problématique

Nombre de cas d'enfants portés disparus dans l'UE (2008‐2011) et par État membre (2011)
Nombre de cas d’enfants portés disparus dans l’UE (2008‐2011) et par
État membre (2011)

Les disparitions d’enfants ont plusieurs causes: fugues, enlèvements parentaux, enlèvements criminels, disparitions de mineurs migrants non-accompagnés, accidents, égarements. Parfois la cause des disparitions n’est pas connue. Quelles que soient les raisons, les risques pour la sécurité, la santé physique et mentale, le bien-être et la vie de ces enfants sont très importants. Ils peuvent subir des actes de violence, devenir victimes de la traite des êtres humains ou être forcés à la mendicité et à l’exploitation sexuelle.

Des données fiables sont indispensables afin de mettre au point des politiques efficaces destinées à prévenir et combattre ce phénomène. Néanmoins, des différences en termes de définitions et de méthodes de collecte des données entre les États membres rendent difficile le recueil de statistiques complètes et comparables. Ainsi, l’ampleur réelle de ce problème à l’échelle de l’UE demeure incertaine. Une étude publiée en 2013 par la Commission européenne formule des recommandations à cet égard et fournit des estimations permettant d’avoir un aperçu de la situation (Figure 1).

La Fédération européenne pour les enfants disparus et sexuellement exploités “Missing children Europe” (MCE) précise que la fugue représente la cause principale de disparition d’enfants (50%), suivie par les enlèvements parentaux (36%), la disparition des mineurs non-accompagnés (2%) et les enlèvements criminels par des tiers (2%). Le problème des enfants disparus ne se limitant pas aux frontières nationales, des politiques européennes sont indispensables pour combattre ce phénomène, souligne MCE.

Que fait l’Union européenne?

Les systèmes de protection de l’enfance relèvent essentiellement de la responsabilité des États membres. L’UE joue également un rôle très important compte tenu de son objectif de promouvoir la protection des droits de l’enfant (article 3 du Traité sur l’UE), explicitement reconnu avec l’entrée en vigueur du Traité de

Lisbonne. Par ailleurs, la Charte des droits fondamentaux dispose que les enfants ont droit à la protection et aux soins nécessaires à leur bien-être (article 24). L’UE a adopté divers instruments relatifs à la protection de l’enfance, couvrant un large éventail de domaines dont la coopération judiciaire en matière matrimoniale, la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants et contre la traite des êtres humains, les droits des victimes de la criminalité, ainsi que l’asile et l’immigration. En ce qui concerne les enfants disparus, le Programme en matière de droits de l’enfant (2011) souligne l’importance pour l’Union d’aider les États membres à instaurer rapidement un numéro d’appel d’urgence ainsi qu’à mettre en place des dispositifs d’alerte en cas de disparitions d’enfants. Dans ses conclusions du 5 décembre 2014 sur les droits de l’enfant, le Conseil de l’UE invite les États membres et la Commission à renforcer la coopération transnationale et à échanger les bonnes pratiques concernant la collecte et la diffusion de données.

116 000, le numéro d’appel européen

Aux termes de la Décision 2007/116/CE, les États membres doivent réserver ce numéro d’appel d’urgence pour le signalement d’enfants disparus. Le fait qu’il soit identique dans toute l’Union vise à faciliter l’assistance aux enfants et familles en détresse même lorsqu’ils se trouvent en dehors de leur État membre d’origine. La Directive 2009/136/CE dispose que les États membres doivent tout mettre en œuvre pour garantir l’accessibilité des citoyens à ces lignes d’urgence. Pour contribuer à leur mise en place, l’UE a alloué 7,5 millions d’euros au titre du programme “Daphné”, qui, à partir de 2014, a été incorporé dans le programme “Droits, égalité et citoyenneté”. Pour 2015, 1,7 millions d’euros sont prévus par la Commission pour soutenir le fonctionnement des lignes 116 000 existantes et promouvoir leur durabilité après la fin de ce financement. Les “hotlines” sont opérationnelles dans tous les États membres, excepté en Finlande.

MCE met en exergue l’importance des lignes 116 000 qui ont traité plus de 5000 cas de disparitions en 2013. La fédération souligne, en outre, les défis importants auxquels ces lignes doivent faire face. Parmi ceux-ci ressortent principalement le manque de ressources financières et le soutien insuffisant de la part des gouvernements.

Les dispositifs d’alerte en cas de disparitions

À l’instar des programmes “Amber Alert” en vigueur aux États-Unis et au Canada, 12 États membres (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Grèce, Irlande, Italie, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Roumanie et Royaume-Uni) ont mis en place des systèmes d’alerte en cas d’enlèvements ou de disparitions inquiétantes susceptibles de mettre à risque la vie des enfants. Leur objectif est de recueillir, dans les heures suivant la disparition, tout élément d’information permettant de localiser l’enfant. Ils complètent ainsi les autres moyens de recherche (p. ex. campagnes d’affichage, signalements dans le cadre du système d’information Schengen, diffusion via Interpol). La Commission soutient financièrement la mise en place de ces dispositifs dans les États membres, avec l’interopérabilité transfrontalière. Elle a également mis au point un guide sur les meilleures pratiques concernant le lancement d’une alerte d’enlèvement transfrontalière.

Parlement européen

La fonction de médiateur du Parlement européen pour les enfants victimes d’enlèvement parental transfrontalier a été créée en 1987. Au fil des années, le médiateur (Mme Mairead McGuinness depuis 2014) a joué un rôle important de coordination et d’enquête sur ce type d’enlèvements, comme indiqué dans une étude du Parlement de 2015.

Dans sa déclaration du 2 septembre 2008 sur la coopération d’urgence pour retrouver les enfants disparus, le Parlement a invité les États membres à se doter de systèmes d’alerte et à conclure des accords de coopération avec tous les États frontaliers, permettant le déclenchement rapide d’alertes transfrontalières.

Par ailleurs, dans la résolution du 27 novembre 2014 sur le 25ème anniversaire de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, les députés ont insisté sur la nécessité d’une approche mieux coordonnée pour retrouver les enfants disparus dans l’UE. Ils ont demandé aux États membres de renforcer la coopération policière et judiciaire dans les dossiers transfrontaliers qui concernent des enfants, et de développer des permanences téléphoniques pour la recherche d’enfants disparus. Les États membres devraient faciliter en outre l’adhésion d’États tiers à la Convention de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, a souligné le Parlement.

En décembre 2014, l’intergroupe “Droits de l’Enfant” a été créé au sein du Parlement européen, en réponse à l’appel lancé en 2013 par plusieurs organisations de la société civile (“Child Rights Manifesto“). L’objectif de l’intergroupe est de contribuer à la prise en compte efficace des droits de l’enfant dans l’élaboration de la législation et des politiques à l’échelle de l’UE.